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Rechercher : les mots du spectacle en politique

Variations sur des thèmes très humains

livre-cantates-de-proximite.jpgJacques Jouet, Cantates de proximité, « Scènes et portraits de groupes », P.O.L., 2005

 

Jacques Jouet aime les contraintes oulipiennes, les gens (dans le métro, dans la rue, en groupes), la musique des mots, Raymond Queneau et Jean-Sébastien Bach… En outre, il aime écrire (des essais, des récits, des poèmes), et les Cantates de proximité sont ici rassemblées comme des humains en société, mais comme eux peuvent être considérées individuellement.

 

Placées (entre autres) sous l’égide de Max Beckmann, « peintre d’histoire », dont les apparitions (ou plutôt celles de certaines de ses œuvres) rythment l’ensemble, ces cantates sont composées de variations sur des sujets collectifs. De même que beaucoup d’entre elles sont encadrées par des listes, des séries de mots clés qui ouvrent et ferment chaque unité textuelle, de même il est possible de résumer le tout en énumérant les thèmes. Il y a donc, dans le désordre et à quelques notes près : des élèves de collège et de terminale L, des étudiants, des militants associatifs, des prud’hommes en stage de formation, une équipe féminine de basket, la famille Bach, des habitants de Ouagadougou, des photographes, les permanents du Haut-Koenigsbourg, des architectes, des employés de l’usine Sollac de Biache ou d’une filature en fin de vie – les uns et les autres victimes de la dégradation sociale, la fête et les révoltes du 1er mai, Rostropovitch devant le mur de Berlin, les comédiens d’une pièce de Marivaux, des vaches, une rue de Calais, des syndicalistes, les morts du « Mémorial indien » (Pas-de-Calais)…

 

Et comment se combinent ces variations ? En phrases très brèves ou très longues (ces dernières posant, dans la tonalité du « à supposer que… », des hypothèses de travail), en récits, dictons, dialogues, portraits (poétiques) individuels ou collectifs, citations, comptes, chaînes, textes journalistiques, texte en blanc, questions qui persistent jusqu’à l’enterrement du livre en personne…Surtout, des poèmes à formes plus ou moins fixes – et leur liste en est un à elle seule : pantoums, monostiques, redondes, haïkus, « un seul mot », sextines, morale élémentaire, sonnets, quinines, poèmes de métro (spécialité jouetienne), bruits/cris, canto/cantate, chant patriotique, propositions nominales, « terza rima berrychonne », quenoum…

 

Cantates de proximité est une œuvre complète (comme on dit d’un menu), dont l’élaboration est en phase avec l’attachement à la littérature et à ses théories (Barthes avant Queneau, Perec et consorts), mais aussi pleinement aux humains, aux proches, à nous, interprètes, auditeurs, lecteurs. Comme le théâtre, comme la musique, la poésie est un miroir à peine déformant.

 

Jean-Pierre Longre

 

www.pol-editeur.com

 

www.oulipo.net/oulipiens/jj

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19/06/2010 | Lien permanent

« Je viens vivre »

Poésie, francophone, Patricia Cottron-Daubigné, L’Amourier, Jean-Pierre LongrePatricia Cottron-Daubigné, Ceux du lointain, L’Amourier, 2017

Variation sur une question bien connue : peut-on faire de la « bonne poésie » avec de « bons sentiments » ? Oui, si ceux-ci ne sont pas une excuse, et si la poésie en question n’est pas un alibi. Et oui, les poèmes de Patricia Cottron-Daubigné chantent avec force, douleur et vérité la force, la douleur et la vérité de ceux qui cherchent refuge contre la violence, « ceux à qui nous enlevons même / la petitesse d’un pré-fixe comme un bout de terre » : « im-migrants », « é-migrants », « migrants » tout court…

Le poète d’aujourd’hui n’est pas seul à dénoncer « la cruelle désolation », « la guerre, la fuite, l’errance ». C’est sur L’Énéide de Virgile que Patricia Cottron-Daubigné fait reposer toute la première partie de son livre, « Énée de Syrie » rappelant « Énée de Troie »,  « exilé de tous les siècles de tous les lieux », portant son père et le poids de la guerre sur ses épaules. « C’est chez Virgile que je lis ce que je cherche dans mes mots depuis des mois. Je lis, je regarde, je cherche, je pleure, j’ai honte, j’écris. » (ce « j’écris » deviendra pluriel à la toute fin du recueil : « nous écrirons », manière d’implication collective dans le drame de ceux qui ont à franchir « tant d’écueils et tant d’eau »).

Implication dans l’histoire, implication dans l’écriture de l’actualité : ce peut être le rythme du vers mimant la marche exténuante : « je marche / je ne sais plus / le jour / j’ai compté / au début / puis la peur / a remplacé / les jours / et les nuits… » ; ce peut être un poème infini fait des noms de ceux qui sont morts « en Méditerranée et sur les routes d’Europe ». Cela n’exclut ni les évocations des « camps » délabrés où vivent ceux et celles chez qui l’on voyait « le bel imaginaire de l’enfance lointaine et des livres, des poèmes, du rire et du mouvement, du voyage libre, des jupes et des grands yeux noirs », ni celles du « ban », cette « banlieue de la banlieue » où sont relégués les « bannis », ni le chantant contraste entre la misère et le rire de Brika la Rom.

Ceux du lointain met en poésie les rivages, les naufrages, les images des hommes, des femmes, des enfants que, trop souvent, nous ne voulons pas voir malgré « le flot des mots » et « le mouvement des écrans ». Comme si l’auteure avait décidé que l’expression de notre « honte », de notre « sauvagerie » ne pouvait passer que par la poésie. Elle a raison, avec Virgile et quelques autres, de leur donner au moins le réconfort des mots, de leur donner la parole : « je ne viens rien conquérir / je viens vivre. ».

Jean-Pierre Longre

www.amourier.com

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03/04/2017 | Lien permanent

Noces de sang

Roman, francophone, Romain Verger, Le Vampire Actif, Jean-Pierre LongreRomain Verger, Fissions, Le Vampire Actif, 2013

« Je passe ici le plus clair de mon temps à écrire. Je n’ai que ça, d’ailleurs, le temps. Et le terrible ennui. Je l’écosse. Je le décompte en cris, cachets et convulsions. Je l’égrène en mots ». Le narrateur, enfermé dans son asile et dans son passé, « assure [sa] survie » en racontant à sa manière, en dévoilements successifs et suggérés, sa rencontre et son mariage avec Noëline, suspendant dès le début l’angoissante question : « Qu’ont-ils fait de nous, Noëline, qu’ont-ils fait de toi ? ». Car le mariage en question s’est mué en terrifiante cérémonie.

Il y aurait beaucoup à dire sur ce roman à la fois palpitant (comme on dit d’un cœur qui bat sans mesure), violent, fantastique, satirique, tragique… La tragédie, justement, au sens étymologique du terme (le chant du bouc), est au centre du récit, avec les cris de la mariée, le sacrifice sanguinolent du bouc destiné à la broche, d’autres cris encore obsédants jusqu’au meurtre, des conversations familiales théâtralisées, l’image envahissante de la bouche déformée et du masque facial cabossé, la folie générale et particulière, le tout sur fond de montagnes désertes et de grande bâtisse isolée… Beaucoup à dire, beaucoup à analyser…

De ce foisonnement, chacun garde, comme à l’audition d’un morceau de musique, ce que sa forme et son état d’esprit lui enjoignent de garder. La dominante du livre de Romain Verger, c’est son caractère absolument romanesque, fruit d’un travail sans concessions sur une matière à la fois opaque et malléable. La structure narrative élaborée, le style aux allures baroques en font un ensemble littéraire plein, fait d’un mélange de complexité et de simplicité, de préciosité et de brutalité. Phrases frappantes, formules délicates, motifs martelés, mots rares rythment une prose dont on a du mal à se détacher, rivés à elle comme le narrateur à son récit.

Jean-Pierre Longre

www.vampireactif.com

www.rverger.com

Samedi 15 juin à 18h30, librairie Point d'Encrage, 73 rue Marietton, 69009 Lyon, rencontre-lecture avec Romain Verger autour de son roman Fissions, et avec Anne-Sylvie Homassel autour du dernier numéro de la revue Le Visage Vert. En présence des éditeurs du Vampire Actif.

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12/06/2013 | Lien permanent

Se défaire du monde

Roman, francophone, Laurence Plazenet, Gallimard, Folio, Jean-Pierre LongreLaurence Plazenet, La blessure et la soif, Gallimard, 2009, Folio, 2011

« Nous avons été deux hommes juchés face au mal. J’ai su que vous souffriez comme je souffrais. Nous adressions à des dieux différents des lamentations qui n’empruntaient pas les mêmes mots. Je ne savais pas quelle peine vous avait conduit près de moi. Je ne pensais pas qu’il fût de peine qui valût la mienne. Mais vous étiez venu du bout de la terre. Nous fûmes une seule protestation et l’amour qui ne renonce pas ».

Ces deux hommes, Monsieur de la Tour et Lu Wei, n’étaient pas faits pour se connaître : le premier, noble français plus ou moins mêlé à la Fronde, et le second, dignitaire chinois déchu par les guerres et le renversement de la dynastie des Ming, sont séparés non seulement par les océans, mais aussi par leurs origines et leurs cultures. Pourtant, leur rencontre silencieuse et leur amitié précautionneuse sont le fruit d’une convergence qui les rend inévitables : Monsieur de la Tour, brûlant d’un amour coupable et partagé pour Madame de Clermont, fuit au-delà des mers et se retrouve, au bout d’un périple aussi hasardeux que dangereux, sur un îlot où s’est retiré Lu Wei, souffrant lui-même d’un désespérant mal d’amour pour son épouse disparue. Commencent douze années de condamnation volontaire, de réclusion ascétique, au cours desquelles la soif d’absolu tente de panser la blessure, où la quête du vide le dispute à l’espoir en Dieu, ce dieu que Monsieur de la Tour cherchera encore en France, réfugié à Port-Royal, dans le plus complet dénuement, dans cet « abandonnement » qui l’accompagnera jusqu’à la fin.

Le roman de Laurence Plazenet se déroule comme une longue litanie submergeant les heurts, les atrocités, les décompositions qu’il dévoile. Psalmodiées en un récitatif qui donne autant d’importance à la musique des mots qu’à leur contenu, les phrases, dont la sobriété toute classique s’accommode parfois de circonvolutions baroques, sont prenantes. La stylisation de la forme impose l’évidence des faits et des pensées, donne à la prose une profondeur qui révèle celle des âmes.

Jean-Pierre Longre

www.folio-lesite.fr  

Laurence Plazenet vient de publier Disproportion de l'homme, Gallimard, 2011. Lecture et chronique à venir…

 

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12/09/2011 | Lien permanent

Les secrets de la Messe en si

Beaute_du_geste_vignette.jpgCatherine Fuchs, La beauté du geste, Bernard Campiche Éditeur, 2010

Gianni Orsini, chef d’orchestre autour duquel tourne l’intrigue principale du roman, a comme suspendu son « geste ». Sa disparition laisse perplexe son entourage, parmi lequel les cinq héroïnes, qui ont toutes quelque chose à voir avec lui (musique, amour, rencontre de hasard…) et qui ont toutes à voir les unes avec les autres. Il y a donc Gianni, il y a Marianne, Isabelle, Tatiana, Katalin, Béatrice, et il y a Jean-Sébastien Bach, dont l’œuvre est « si puissamment rassurante », et envers qui Béatrice, entre autres, « se sent transportée de reconnaissance ».

Le roman de Catherine Fuchs, elle-même musicienne, est un concert. Les mots, « miraculeux assemblages qui exaltent le banal et disposent le merveilleux à hauteur d’homme », et les notes, qui n’expliquent rien mais dont la combinaison peut éclairer bien des choses, développent le même récit, suivent la même structure : celle de la fameuse Messe en si, avec ses cinq parties auxquelles correspondent les cinq sections du livre : Kyrie, Gloria, Credo, Sanctus, Agnus Dei. Le concert donné en la cathédrale de Genève est la caisse de résonance des souvenirs, des sentiments, des questionnements des protagonistes, interprètes ou auditrices, pour lesquelles les mots, dits ou tus, forment une chaîne traçant une continuité de l’une à l’autre. Continuité complexe, faite d’anticipations et de retours en arrière, de mouvements et tonalités divers, de reprises thématiques, par lesquels le lecteur, ne maîtrisant plus rien, ne peut que se laisser guider, comme par la musique.

Celle-ci permettra-t-elle de lever les mystères, celui de la disparition de Gianni comme ceux que chaque femme recèle en elle ? Au contraire, en augmentera-t-elle la puissance ? En tout cas, elle contient tout ce qui fait la vie, et ce que Marianne, chantant son dernier solo sur « Miserere nobis », évoque en son inconscient : « Prends pitié de toutes ces ébauches, de ces réconciliations impossibles, de ces amours inavouées, de ces timides amitiés, de ces jugements si vite définitifs ; regarde ces dévouements admirables, ces haines dévastatrices, ces promesses tenues, ces reniements quotidiens ».

Jean-Pierre Longre

www.campiche.ch

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06/09/2010 | Lien permanent

Passeur de littérature

Revue, roman, nouvelle, Suisse, Roumanie, Marius Daniel Popescu, Jean-Pierre LongreJournal Le Persil n° 100, puis 101-102-103, automne 2015  

Marius Daniel Popescu aime la vie quotidienne, il aime les gens qui la traversent et la peuplent, et des moindres gestes, des moindres objets, des moindres mots s’échappent sous sa plume des paysages nouveaux – par la parole, le souvenir, l’imagination. Le banal, chez lui, ne l’est jamais; de l’ordinaire naît l’extraordinaire. S’il est besoin de le prouver encore, le numéro 100 du Persil, « journal qui cultive le goût de la cuisine des mots de chaque jour », le fait à merveille. Des poèmes nouveaux, et deux extraits d’un roman à venir (et attendu), Le Cri du barbeau : l’un puisé dans un épisode de la vie actuelle – petits incidents et conversations paisibles –, l’autre dans les souvenirs des « travaux patriotiques » organisés par le « parti unique » – ramassage obligatoire de pommes de terre par les étudiants, sous la surveillance des professeurs d’université, à l’époque de la dictature en Roumanie.

Revue, roman, nouvelle, Suisse, Roumanie, Marius Daniel Popescu, Jean-Pierre LongreCette centième parution, donc, qui dresse aussi la liste des 99 précédentes, avec tous les détails sur leur sommaire, contient « des textes d’un seul auteur ». Mais le numéro triple qui suit dans la foulée (101-102-103) est, comme la plupart des précédents, laissé à la disposition d’autres auteurs de la Suisse romande (Ivan Farron, Serge Cantero, Bertrand Schmid, Janine Massard, Silvia Härri, Ferenc Rákóczy, Lucas Moreno, Lolvé Tillmans, Dominique Brand, Heike Liedler, Michel Layaz) et de Sanaz Safari, écrivaine iranienne qui, grâce à David André et Marius Daniel Popescu, publie ici ses deux premiers textes écrits en français, « à l’attention d’un lectorat dont elle ignore tout ».

Revue, roman, nouvelle, Suisse, Roumanie, Marius Daniel Popescu, Jean-Pierre LongreRoumanie, Suisse romande, Iran, et tous les espaces que l’écriture laisse entrevoir : Le Persil, « parole et silence », est un généreux passeur de littérature, au plein sens de l’expression.

Jean-Pierre Longre

www.facebook.com/journallitterairelepersil

mdpecrivain@yahoo.fr

lepersil@hotmail.com

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12/11/2015 | Lien permanent

Cinquante ans de Off

Festival Off d’Avignon, juillet 2015. « Le plus grand théâtre du monde ». 

Théâtre, littérature, Stefan Zweig, Jean Giono, Anca Visdei, Jean-Claude Grumberg, Matéi Visniec, Jean Tardieu, Festival Off d’Avignon, Jean-Pierre LongreLe premier spectacle « off » d’Avignon, créé par André Benedetto, eut lieu le 10 juillet 1966, en marge du Festival officiel. Premiers pas modestes et fulgurants d’un événement qui, d’année en année, a envahi la ville et les salles disponibles – collèges, chapelles, boutiques, lieux publics, théâtres privés… jusqu’à compter, pour sa cinquantième année d’existence, plus de 1300 spectacles quotidiens venus non seulement des quatre coins de France, mais du monde entier, comme le souligne Greg Germain, président d’Avignon Festival & Compagnies.

Comment le spectateur lambda peut-il choisir ? Comme chaque année, il y en a pour tous les goûts, du « boulevard » au théâtre engagé, du comique au tragique, du classique à l’avant-garde, de l’austérité textuelle à la mise en scène chatoyante, de la lecture à la danse, du mime à la musique… Faire confiance aux noms des auteurs, des troupes, des metteurs en scène, des comédiens ? Se fier à la critique ? Se livrer à la séduction des présentations ? Écouter le bouche à oreille ou les rumeurs de la rue ? En ce début de mois, voici une petite contribution sélective.

Théâtre, littérature, Stefan Zweig, Jean Giono, Anca Visdei, Jean-Claude Grumberg, Matéi Visniec, Jean Tardieu, Festival Off d’Avignon, Jean-Pierre LongreParmi les One-(wo)man-shows, particulièrement adaptés à de petites salles (10 à 50 places), signalons la Lettre d’une inconnue de Stefan Zweig (Présence Pasteur), beau et terrible récit rétrospectif adressé par une femme passionnée à un homme de lettres volage et insoucieux de ses nombreuses conquêtes féminines, parmi lesquelles elle figure en anonyme. Violaine Savonnet, mise en scène par Danielle Latroy-Fuster, restitue sans pathos mais sans concessions la dramatique réalité du souvenir, dans un jeu qui fait passer le personnage par toutes les nuances de l’amour et toutes les facettes du désespoir.

Théâtre, littérature, Stefan Zweig, Jean Giono, Anca Visdei, Jean-Claude Grumberg, Matéi Visniec, Jean Tardieu, Festival Off d’Avignon, Jean-Pierre LongreDans un registre différent, mais toujours dans l’intimité d’un lieu restreint, Mathieu Barbier livre Des nouvelles de Giono (Espace Roseau, mise en scène de Jean-Claude et Marie-Françoise Broche) ; il fait bien mieux que les dire, ces nouvelles : il les joue littéralement, incarnant de sa voix aux sonorités vibrantes et variées plusieurs de ces personnages hauts en couleur des Alpes provençales, avec leur accent, leur franc-parler, leurs non-dits, leur simplicité, leur générosité – leur humanité. Ce faisant, le comédien, de velours côtelé vêtu, fait à merveille redécouvrir la prose rocailleuse et poétique de l’écrivain.

Théâtre, littérature, Stefan Zweig, Jean Giono, Anca Visdei, Jean-Claude Grumberg, Matéi Visniec, Jean Tardieu, Festival Off d’Avignon, Jean-Pierre LongreAutre genre, autre sorte de personnage : dans La patiente, Anca Visdei, prolifique dramaturge franco-roumaine, donne à voir et à délicieusement disséquer les entrevues successives d’un psychanalyste avec une patiente plutôt originale, toujours habillée de rouge, refusant de s’étendre sur le divan et mettant à mal la traditionnelle relation freudienne entre les deux types de personnes. L’homme de l’art parviendra-t-il à percer la carapace, à atteindre le cœur d’un personnage qui, tout en la voilant, révèle une vraie sensibilité ? Un sujet sérieux, un texte drôle, traité comme tel par des comédiens talentueux (Sabine Laurent et Yann Loiret mis en scène par Aurélie Goulois).

Le Off d’Avignon ne serait pas ce qu’il est sans les pièces qui donnent le premier rôle à un personnage passant souvent inaperçu tout en étant omniprésent : le langage. Parmi ces pièces, on en recommandera trois.

Théâtre, littérature, Stefan Zweig, Jean Giono, Anca Visdei, Jean-Claude Grumberg, Matéi Visniec, Jean Tardieu, Festival Off d’Avignon, Jean-Pierre LongreSi ça va, bravo, de Jean-Claude Grumberg, est une comédie tantôt burlesque tantôt amère à deux personnages (en l’occurrence, deux comédiens réjouissants de complicité malicieuse et de fausse rivalité, Renaud Danner et Étienne Coquereau, mis en scène par Johanna Nizard) qui enchaînent les scènes cocasses, les dialogues de sourds, les jeux verbaux, les réparties inattendues, les situations satiriques et absurdes. Une bonne heure de rire et de méditation sur les richesses et les ambiguïtés du langage et des relations humaines…

Dans le livre intitulé Le cabaret des mots, paru en 2014, Matéi Théâtre, littérature, Stefan Zweig, Jean Giono, Anca Visdei, Jean-Claude Grumberg, Matéi Visniec, Jean Tardieu, Festival Off d’Avignon, Jean-Pierre LongreVisniec fait monologuer et dialoguer des mots de toutes sortes. La Compagnie des Ondes, avec trois comédiens pleins de vivacité et de talents variés (Rebecca Forster, Eva Freitas et Aurélien Vacher), a fait parmi ces mots un choix judicieux. Dans Moi le mot (mise en scène de Denise Schropfer, Ateliers d’Amphoux), ça fuse et ça explose, en paroles et en musique… Chaque mot est traité avec drôlerie et intelligence, chaque séquence extirpe la substance poétique de ces petits objets qui deviennent ainsi de véritables personnages.

Jean Tardieu est sans conteste un maître de ce qu’il nomme lui-Théâtre, littérature, Stefan Zweig, Jean Giono, Anca Visdei, Jean-Claude Grumberg, Matéi Visniec, Jean Tardieu, Festival Off d’Avignon, Jean-Pierre Longremême La comédie du langage. Dans De quoi parlez-vous ? (Théâtre Buffon), les quatre comédiens Sophie Accard (qui a aussi assuré la mise en scène), Anaïs Merienne, Tchavdar Pentchev et Léonard Prain, multipliant les personnages aux rôles, aux costumes, aux gestes, aux attitudes les plus divers, s’en donnent à cœur joie pour donner au langage verbal ses sens les plus détournés, ses aspects les plus inattendus. Les cinq courtes pièces (Finissez vos phrases, Oswald et Zénaïde ou les apartés, De quoi s’agit-il ?, Le guichet, Un mot pour un autre) le mettent dans toutes les situations, dans toutes les positions. On rit franchement, sans manquer de mesurer sérieusement la complexité des mots.

Il reste deux semaines pour courir à Avignon, où le pittoresque le dispute à la beauté, à la poésie, à l’humour, à la sensibilité. Deux semaines pour voir les six pièces signalées, et bien d’autres encore. Le choix ne manque pas.

Jean-Pierre Longre

Liens utiles :

www.avignonleoff.com  

Lettre d’une inconnue : Présence Pasteur, 13 rue du Pont Trouca. Rés. 04 32 74 18 54

Compagnie Violaine : www.compagnieviolaine.biz

 

Des nouvelles de Giono : Espace Roseau, 8 rue Pétramale. Rés. 04 90 25 96 05

http://www.mathieu-barbier.com

http://www.roseautheatre.org/spip.php?article28

 

La patiente : L’Alibi théâtre, 27 rue des Teinturiers. Rés. 04 90 86 11 33

http://www.ancavisdei.com/livres/l-patien.html

http://jplongre.hautetfort.com/archive/2010/08/04/les-deux-soeurs.html

 

Si ça va, bravo : 3 Soleils, 4 rue Buffon. Rés. 04 90 88 27 33

http://www.theatre-contemporain.net/spectacles/Si-ca-va-b...

www.les3soleils.fr

 

Moi le mot : Les Ateliers d’Amphoux, 10-12 rue d’Amphoux. Rés. 04 90 86 17 12

http://jplongre.hautetfort.com/archive/2015/01/25/chaque-...

https://www.facebook.com/compagniedesondes

 

De quoi parlez-vous ? : Théâtre Buffon, 18 rue Buffon. Rés. 04 90 27 36 89

Compagnie C’est-pas-du-jeu : www.cpdj.fr

http://jplongre.hautetfort.com/archive/2010/08/01/si-simple-et-si-complexe.html 

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11/07/2015 | Lien permanent

Trois recueils de poésie roumaine (avec leur traduction)

Turcu.jpgMarcel Turcu, Eurorero, édition trilingue roumain – allemand - français. Traduction française de Marius Turcu. Editura Mirton, Timişoara, Roumanie, 2010

 

Un automatisme maîtrisé

 

Dès le poème inaugural, nous sommes avertis : « Juste le monologue sans sens ». Tout disparaît, sauf le langage. Seuls, les mots, imposant leurs images audacieuses, leurs rapprochements aléatoires, dans une écriture qui doit beaucoup à l’automatisme ; mais à un automatisme médité, maîtrisé, pour ainsi dire ordonné.

 

« Mon Dieu, prends soin de ma compréhension », dit l’un des textes. Si compréhension il y a, elle repose principalement sur les harmoniques verbales (et, au passage, saluons le mérite du traducteur, qui a dû se glisser dans la profondeur de ces harmoniques), elles-mêmes tributaires du jeu des mots, relevant d’un souci de précision dans les sollicitations du hasard. Les mots sont « injectés », « accrochés » entre eux selon un rythme significatif, en une « vive rigueur », cette rigueur sans laquelle il n’y a pas de poésie.

 

Les échos littéraires et artistiques (le surréalisme bien sûr, Baudelaire aussi, d’autres encore) donnent au recueil un souffle, une résonance, un espace. C’est d’ailleurs bien à une poésie de l’espace que nous avons affaire : l’espace européen, entre Loire et Weser, entre Nord et Sud (aux poèmes de la France et de l’Allemagne succèdent, à la fin, ceux de la Grèce, du retour vers l’Orient et vers la culture byzantine) ; et lorsqu’il est question du temps, c’est encore sur l’espace qu’il agit : si « l’horloge marche avec exactitude […], les astres s’ouvrent ».

 

Marcel Turcu, né le 13 avril 1940 dans le département de Timis, membre de l’Union des écrivains de Roumanie, a publié dans son pays de nombreux recueils poétiques, entre 1969 et 2009. La traduction française d’Eurorero devrait faire connaître dans la sphère francophone, espérons-le, non seulement le recueil, mais aussi un auteur qui vaut la peine d’être connu bien au-delà des limites de son pays.

 

www.mirton.ro

 

 

Steiciuc.jpgCarmen Veronica Steiciuc, Vitrina cu dimineţi circulare / La vitrine aux matins circulaires, édition bilingue, traduction française Florina Liliana Mihalovici Paralela 45, Roumanie, 2010

 

« Des incertitudes en forme d’aile »

 

« Le mot

qui t’aime de l’intérieur

ne vient jamais seul ».

Les mots, êtres de chair et de sensibilité, formés de « lettres au corps clair » mais aussi de « lettres secrètes », sont les personnages fluctuants, parfois énigmatiques, des scènes poétiques qui composent ce recueil. Des scènes dans lesquelles « les silences ont pris place / aux premières loges », dans lesquelles « les naufragés écoutent du Mozart », dans lesquelles le lyrisme naît de motifs récurrents allant et venant sous les yeux du spectateur (scripteur et lecteur) en un rituel quasiment sacré, intimement lié à la nature (les herbes, la pluie, les chevaux, les papillons…), aux sentiments (l’amour, la solitude), aux sensations qui touchent l’être dans ses dimensions cosmiques et telluriques. Pas de dénouement, uniquement des questions (« qui t’aime maintenant ? ») et « des incertitudes en forme d’aile » (le titre et le dernier vers du dernier poème).

Pas de dénouement, mais une musique suggestive, qui laisse au plus profond de la mémoire des visions, des cadences, des sonorités. Dans son avant-propos intitulé « Lettres d’amour », Mircea Ghiţulescu évoque à juste titre « la technique musicale du canon ». Les reprises (de syntagmes, de mots, d’images souvent séduisantes par leur audace), les échos résonnent d’un poème à l’autre, traçant des réseaux à l’intérieur du livre ; et cela figure comme une extension de ce qui se produit à l’intérieur des textes eux-mêmes, où les enjambements, les répétitions, les refrains rythment les strophes, sans parler des harmoniques fondées sur des mots et des vers à sens multiple. « Ma solitude est habitée par un poème qui m’est inconnu », par exemple : voilà un vers (et un titre) dont l’épaisseur polyphonique laisse entendre une foule de choses irréductibles à toute explication.

Une édition bilingue présente toujours un risque : celui de la confrontation entre deux langues, entre deux textes, avec les écarts inévitables entre les choix de l’auteur, du traducteur et du lecteur (en supposant ce lecteur bilingue). C’est aussi un atout : celui de s’adresser à un double public, et ici, en l’occurrence, de faire apprécier au public francophone des poèmes venus d’une langue et d’une culture à la fois lointaines et voisines, dans lesquels le travail de la forme est en parfaite adéquation avec l’intention lyrique. 

www.edituraparalela45.ro  

 

 

I Pop.jpgIoan Es. Pop, Sans issue / Fără ieşire, anthologie poétique. Choix et traduction du roumain par Linda Maria Baros, L’Oreille du Loup, 2010

 

Dans le labyrinthe

 

Ioan Es. Pop, né en 1958, a publié de nombreux recueils en Roumanie, où il est devenu une figure marquante de la poésie, par la force et par l’originalité de son écriture. Pour le faire connaître du public francophone, il fallait opérer un choix représentatif, et en présenter une traduction fidèle à la lettre et à l’esprit, en regard du texte roumain. C’est chose faite, grâce à Linda Maria Baros, elle-même poétesse.

 

Il n’était sans doute pas aisé de restituer les proses rythmées, les vers brisés, les images surprenantes, les tableaux sanglants qui caractérisent les huit parties de cette anthologie. La poésie de Ioan Es. Pop est un incessant piège tendu au réalisme quotidien, au pittoresque citadin, à la description et à la narration classiques, à l’art du portrait. Toute tradition y est détournée au profit du fantastique, du morbide, de la trivialité ricanante. Une personnification, par exemple, peut tourner à la métamorphose désespérée :

 

« dans la chambre il y a une horloge que hans nourrit en cachette.

tourne plus vite, lui murmure-t-il, tourne plus vite. »

 

ou encore :

 

« la nuit un oiseau est entré par la fenêtre

j’étais sûr qu’il s’agissait de hans.

l’oiseau était chauve comme lui et ivre mort. »

 

La boisson omniprésente, un recours ? Plutôt une fuite vers la mort, vers le néant : même « l’ami », sorte de Christ dévoyé, « se soûle et dort où ça lui prend » ; Dieu lui-même, comparable à celui de Lautréamont,

 

« sentira diablement mauvais et le monde

l’évitera de loin.

il aura faim et on le trouvera allongé

derrière la HLM, la bouche grande ouverte

ruisselant d’abcès. »

 

Avec cela, inutile de préciser que le titre se justifie. La seule « issue » est l’absence d’issue, le seul chemin un labyrinthe. Toutefois, mènerait-il au néant, ce chemin existe et nous devons le suivre, suivre les mots du poète qui nous mènent là où nous devons aller, « même si c’est nulle part » :

 

« nous devons nous y rendre, mon cher compagnon,

même si momfa n’existe pas.

mais même si momfa n’existe pas

ou même si elle n’existe pas encore,

nous en approchons à chacun de nos pas. »

 

Resterait-il quelque espoir ?

 

www.loreilleduloup.blogspot.com  

Jean-Pierre Longre

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07/11/2010 | Lien permanent

Méandres et secrets

Mauvignier.jpgLaurent Mauvignier, Seuls, Les éditions de Minuit, 2004

 

Pour vraiment parler du roman de Laurent Mauvignier, il faudrait analyser ce qui fait la spécificité de son style. Et pour analyser cette spécificité, il faudrait pouvoir rendre compte des méandres de la syntaxe se heurtant à l’abrupte verticalité d’un mur de silence ou d’un abîme de confusion, pouvoir rendre compte du suspens des phrases, du heurt des mots, bref d’une écriture qui se coule dans le moule de l’émotion obstinée, ressassante et redondante, qui s’y coule le plus entièrement possible, ne laissant pas un recoin vide, permettant au lecteur de pénétrer au plus intime de l’intimité des personnages. Un exemple entre tous :

    « Il m’a regardé dans les yeux et il a dit, papa, tu sais ce qu’elle n’a pas deviné, jamais, c’est que, c’est seulement que,

      et sa voix tout à coup s’est tue, coupée par une sorte de hoquet et de tic sur la lèvre […] ».

 

Ce que Tony n’arrive pas à dire, pour l’instant, à son père, et qu’il n’arrivera jamais à dire à Pauline son amie de toujours, c’est qu’il l’aime d’amour, et c’est ce qu’apparemment elle se refuse à comprendre. Étudiants, ils ont habité, bu et mangé ensemble, elle est partie en Amérique, il a arrêté ses études et pris un petit boulot, elle est revenue faire appartement commun avec lui en attendant autre chose, ayant quitté Guillaume son compagnon d’Amérique, et lui, Tony, oscille entre deux désirs contradictoires, dire l’amour et le cacher ; deux désirs qui sont aussi deux peurs : « Il a eu peur de ce regard qu’ils ont partagé et peur aussi qu’elle connaisse ce regard, que cette tension dans le regard Pauline l’ait reconnue comme elle l’avait vue déjà tant de fois sur les visages des hommes au moment où ceux-là vont basculer dans la gravité, quand ils vont parler d’amour et d’engagement, se préparer à offrir des bijoux et cette fidélité à laquelle le plus souvent ils manqueront, par ennui plus que par désir ». L’amour, les mots ne viennent pas pour le dire, les gestes artificiels, les attitudes fausses s’empressent de le cacher.

 

Á qui, à bout de forces et de grimaces, va-t-il pouvoir se confier ? Á son père, dont pourtant (ou est-ce une bonne raison ?) un contentieux pathétique et secret le sépare. C’est par ce père que nous, lecteurs, connaissons le drame de Tony, drame qui va se précipiter lorsque Pauline, en un accès de joie, va retomber dans les bras de Guillaume venu la retrouver, ultime personnage et ultime narrateur. Et c’est par ce père encore que Pauline va savoir, avec les mots qu’il doit pouvoir trouver.

 

Ils sont seuls. Tony avec son amour et son mutisme, Pauline avec son amitié et son refus, mais aussi le père avec ses secrets et sa douleur, Guillaume avec sa vie et ses remords, et finalement le lecteur lui-même, sollicité par la présence oppressante des personnages et de leurs énigmes, sollicité aussi par le « c’est moi » des narrateurs, dressant entre lui, le lecteur, et eux, les êtres fictifs, l’épaisseur d’un récit qui pourrait aussi bien être un miroir. Ils sont seuls, de cette solitude envahissante que fait couler en nous le courant irrépressible du soliloque.

 

Jean-Pierre Longre

 

http://www.leseditionsdeminuit.com

 

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01/08/2010 | Lien permanent

Les parenthèses de l’existence

Alain Gerber, Longueur du temps, Alter ego éditions, 2011 roman, autobiographie, poésie, musique, francophone, Alain Gerber, Alter ego éditions, Jean-Pierre Longre

Alain Gerber et la musique, c’est tout un roman ; une somme de romans. Et malgré les apparences, Longueur du temps ne déroge pas : comme dans les livres précédents, il y a la matière biographique, la narration menée sur fond d’images fortes, l’invention verbale, les thématiques musicales (avec les silhouettes de fameux jazzmen passant à l’arrière-plan, parfois même jusque sur le devant de la scène), l’évocation de pays lointains et de rues toutes proches, Bavilliers et Ouagadougou, Paris et Montréal, Belfort et Corfou, le beau pays d’« Enfrance » et le légendaire Mexique – odyssées dans l’espace et dans le temps.

À part cela, il faut bien distinguer : la matière biographique est tout ce qu’il y a de personnel, même si, mettant à contribution le couple et l’univers environnant, elle ne doit rien à l’égotisme ; et la narration est versifiée – comme Chêne et chien, « roman en vers » dans lequel Raymond Queneau se raconte sans fards. La comparaison n’est pas hasardeuse : chez l’un comme chez l’autre les vers sont la composante nécessaire de la forme romanesque ; ils lui donnent sa ponctuation, son rythme, ses mesures, ses syncopes… Syntagmes sonores, phrases coupées, listes, inventaires, mots martelés, l’écriture au plus fondamental de sa composition est musicale, à la recherche de

« la formule cinglante / le sésame /qui lève l’écrou et brise les scellés / du Temps »,                                                                                                                                            

le temps, incessant leitmotiv, qui donne leur « tempo » aux souvenirs.

Si la musique est partout, n’oublions pas que tout passe par la littérature. Ce sont les mots, combinés entre eux, qui tentent de lever les voiles de la mémoire, « ce lac sourd plein de rumeurs », et de « l’imaginaire incarné ». Et, comme celles des jazzmen, on voit passer tout près les silhouettes des romans de jadis, La couleur orange, Le plaisir des sens, Le faubourg des coups-de-trique, Une sorte de bleu…

Plutôt que de gloser, le commentateur ne rêve que de céder la place au soliste, pour quelques chorus bien sentis :

« Il est faux que l’on naisse mortel / on le devient seulement après quelques années ».

« Il y aura dès lors / un temps pour écrire / un temps pour voir le monde / comme si c’était un roman / qu’on lit en se déchiffrant soi-même ».

« Sur son propre compte / l’existence nous en dit plus dans ses parenthèses / et notes anodines au bas de la page / que dans les périodes les tropes / sourates sorites et tapageurs épichérèmes /qu’elle nous jette au visage ».

« Le but ultime des voyages est / qu’en passant / la vie va vous frôler / au lieu de vous passer à travers ».

Le reste à l’avenant, au rythme des mots, de la lecture et de la vie.

Jean-Pierre Longre

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05/06/2011 | Lien permanent

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