2669

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Rechercher : les mots du spectacle en politique

Toujours vert

Le persil, journal, 2013

Revue, francophone, Suisse, Roumanie, Marius Daniel Popescu, Jean-Pierre Longre

Réalisé par Marius Daniel Popescu (ou, au moins, avec son concours, et quoi qu’il en soit toujours à son initiative), Le persil, journal littéraire aux voix multiples, lance toujours ses larges feuilles bien remplies sur les chemins de la langue française et dans les champs de la culture européenne. Quelques exemples de l’activité tous azimuts de cette publication qui laisse la parole aux auteurs les plus divers, sans considération de leur notoriété sur le marché de l’édition ? En voici, tout au long de l’année 2013 :

Mai (n° 65-66-67) : inaugurés par un beau témoignage de Gérard Delaloye sur des souvenirs d’amitié roumano-valaisanne, une suite de textes inédits, poétiques, théâtraux, narratifs d’auteurs de Suisse romande.

Juin (n° 68-69) : carte blanche offerte par Marius Daniel Popescu à Herke Fiedler, « auteure, poétesse, performeure » née en Allemagne, vivant à Genève, écrivant en français et faisant cohabiter différentes langues. Textes poétiques, étranges parfois, et qui toujours interrogent le lecteur, dans une mise en page originale.

Juillet-août-septembre (n° 70-71-72) : Vincent Yersin et Daniel Vuataz font le tour des nouvelles maisons littéraires de Suisse romande : interviews d’éditeurs, portraits, genres, activités, particularités, photos, « fiches d’identité » – un numéro qui donne une idée précise de la vie et de la production littéraires locales.

Novembre ( n° 73-74) : réalisé par André Wyss, un numéro consacré à Charles Racine (1927-1995), « poète au talent rare », trop méconnu. Des textes d’André Wyss, Philippe Rahmy, Françoise Matthey, et du poète lui-même, tentent une juste réhabilitation de cette « voix hors du commun ».

Décembre (n° 75) : « Voix de condamnés à mort ». Présentés par Daniel Vuataz et Joséphine Maillefer, des lettres et des poèmes de détenus – beaux documents parfois tout simples, toujours émouvants – « parole et silence », comme se définit Le persil.

Le persil dérange parfois, rassure aussi sur la ténacité de la littérature à rester vivante. Qu’elle continue à vivre, que Le persil, qui a maintenant 10 ans, continue à pousser, malgré un terreau capricieux !

Jean-Pierre Longre

 

Le persil journal, Marius Daniel Popescu, avenue de Floréal 16, 1008 Prilly, Suisse.

Tél.  0041.21.626.18.79.

E-mail : mdpecrivain@yahoo.fr

Association ses Amis du journal Le persil : 
lepersil@hotmail.com

M.D. Popescuhttp://jplongre.hautetfort.com/tag/marius+daniel+popescu

Rencontre avec M. D. Popescu, vidéohttp://www.canal-u.tv/producteurs/universite_lyon_3_division_de_l_audio_visuel_et_du_multimedia/dossier_programmes/lettres/rencontre_avec_marius_daniel_popescu 

 

Lire la suite

03/02/2014 | Lien permanent

Mouvante poésie

Ada Milea, Petit mouton, anthologie bilingue, traduction du roumain par Faustine Vega et Nicolas Cavaillès

Irina Mavrodin, Sang vert, anthologie bilingue, traduction du roumain par l’auteur

éditions hochroth Paris, 2014

Poésie, Roumanie, francophone, Ada Milea, Irina Mavrodin, Faustine Vega, Nicolas Cavaillès, éditions hochroth Paris, Jean-Pierre LongreAda Milea est une artiste aux talents multiples : théâtre, musique, chanson, et poésie. C’est de celle-ci, principalement, que relève Petit mouton, sans qu’il soit fait abstraction des autres genres esthétiques. La chanson, notamment, résonne à maintes reprises dans des textes dont l’oralité se manifeste sous les formes de la comptine détournée, du chant national parodié, de la légende travestie (au premier plan, celle de Mioritza, fameuse ballade populaire).

En quelques textes, se produit le mélange des tonalités et des motifs : l’absurde (si cher à la tradition folklorique roumaine, comme chez Urmuz), l’humour noir et la satire sociale voisinent en bonne entente avec la révolte contre le sort réservé aux peuples, aux femmes, aux petits de ce monde. Pas un instant on ne risque de se détourner d’une poésie qui lance ses appels : « - Oooo, Pastoureau / - Oo, Jouvenceau ! », et invite au rêve collectif : « D’un même mouvement les gens… rêvent tous. / Tous ensemble… rêvent tous ».

Poésie, Roumanie, francophone, Ada Milea, Irina Mavrodin, Faustine Vega, Nicolas Cavaillès, éditions hochroth Paris, Jean-Pierre LongreIrina Mavrodin (1929-2012) est d’abord connue comme essayiste, théoricienne, critique, universitaire de haut vol, traductrice de Proust, Flaubert, Gide, Camus, Ponge et de nombreux autres écrivains ou essayistes… dont elle-même, puisqu’elle est l’auteur des versions roumaine et française des précieux poèmes ici réunis sous le titre de l’un d’eux, Sang vert.

Le sang du corps humain, le vert des « feuilles à nervures », selon une fusion récurrente qui se produit, dans ces courts et beaux textes, entre la nature et l’homme, « sous la peau chaude des pierres », ou bien là où « palpite le cœur des arbres ». Discrètement, l’amour (« écrit sur les ailes des oiseaux ») et la mort (« je ne sais plus / dans quel monde je vis / si je suis ici / ou de l’autre côté ») se glissent entre les « immobiles branches », donnant pérennité aux salutaires et nécessaires mouvements de la poésie et de la vie.

Quoi de commun, tout compte fait, entre Petit mouton et Sang vert ? Formellement, les deux ouvrages offrent de front leurs textes en roumain et en français, et tous deux sont des recueils poétiques. Surtout, leur voisinage dans cette chronique voudrait prouver que le domaine de la poésie est étonnamment étendu, varié, accidenté, inattendu, et montrer, encore une fois, les choix judicieux des éditions hochtoth Paris.

Jean-Pierre Longre

www.paris.hochroth.eu  

Lire la suite

17/06/2014 | Lien permanent

Parole, paradoxe, parabole

Poésie, francophone, Philippe Jaffeux, Atelier de l’agneau, Rougier V. éd., Jean-Pierre LongrePhilippe Jaffeux, Courants blancs, Atelier de l’agneau, 2014

Parmi les formes lapidaires de la littérature, l’aphorisme est l’une des plus modernes (depuis Chamfort), des plus denses et, souvent, des plus paradoxales. Philippe Jaffeux, dans ses Courants blancs, ne déroge pas à ces caractéristiques, tout en y ajoutant un concentré d’énigmatique dont l’esprit du lecteur a du mal à démêler les fils – et il en redemande, le lecteur, cela va sans dire.

Au hasard : « Il dessinait le silence avec des lettres afin de voir sa voix ». Les correspondances de sens (dessiner / voir, silence / voix) pourraient rassurer par leur normalité, si elles n’étaient perturbées par la présence des lettres (que l’on voit ? que l’on entend ?). Et ainsi de suite, dans le même esprit : « Il attendait d’être patient au risque d’être terrassé par l’activité d’un temps imprévisible ». Pour qui voudrait entreprendre l’analyse précise de chaque ligne (26 par page, et 70 pages bien remplies), patience attentive et ouverture d’esprit ne devraient pas manquer.

Contentons-nous de dire que le livre fournit à quiconque matière à méditation foisonnante et à lecture infinie, puisque chaque aphorisme, chaque paradoxe, tout en répondant aux contraintes du genre, résonnent d’harmoniques dont l’écho porte loin. Le « il » ici mis en scène, acteur et spectateur, locuteur et lecteur, personnage et observateur, vit des vies multiples qui s’entremêlent, se retournent sur elles-mêmes, s’étirent et se recroquevillent, s’éclairent et s’assombrissent… La parole et l’écriture, en motifs omniprésents et pour ainsi dire paraboliques, nourrissent l’ensemble, lui donnent corps et ossature thématique. « Les lettres se métamorphosent en sons pour honorer la permanence d’une parole invisible », ou « Sa parole se transforme en image lorsqu’il ferme sa bouche pour garder les yeux ouverts ».

De quoi se dire que la poésie, même si et parce qu’elle est contenue dans des limites strictes, peut nous plonger dans des abîmes buissonnants, bourdonnants, étonnants, stimulants.

Jean-Pierre Longre

Poésie, francophone, Philippe Jaffeux, Atelier de l’agneau, Rougier V. éd., Jean-Pierre LongreP.S. : Reçu avec intérêt, en même temps que Courants blancs, un épais petit courrier, une enveloppe intitulée Courants 505 : le vide (Rougier V. éd.) et contenant quinze lettres soigneusement ficelées où, selon les mêmes principes contraignants, se bousculent d’autres paradoxes aphoristiques, accompagnés cette fois de monotypes de Vincent Rougier. Certes « notre imagination est infinie parce que les limites de la parole sont humaines ».

 

http://atelierdelagneau.com

http://www.rougier-atelier.com  

www.philippejaffeux.com   

Lire la suite

10/06/2014 | Lien permanent

« Rien ne remplace le vivant »

Roman, francophone, Jeanne Benameur, Actes Sud, Jean-Pierre LongreJeanne Benameur, Profanes, Actes Sud, 2013, Babel, 2014

Octave Lassalle, 90 ans, vit seul dans sa grande maison depuis la mort de sa fille Claire et le départ de sa femme Anna pour le Canada. Ancien chirurgien, il ressent le besoin de rassembler de nouveau une équipe autour de lui, une équipe bien choisie qui fasse corps avec lui, qui lutte avec lui dans la dernière phase de sa vie, au moment où il se donne « droit au doute ». Une équipe de « profanes » pour « la lutte sacrée ».

« Chez chacun des quatre, il a flairé le terreau d’une histoire. Quelque chose qui pourrait l’éclairer ». La vie s’organise, chacun accomplissant la tâche qui lui est dévolue, selon un emploi du temps précisément défini. Rien de mécanique ni de contraignant ; l’humain dans ses diverses dimensions prend peu à peu toute sa place, et peu à peu le passé revient ; non seulement celui d’Octave et de ce qu’il a manqué de l’amour d’Anna et de l’existence de Claire, de son enfance et de ses passions, des secrets qu’elle a confiés au journal qu’il découvre comme par effraction, mais aussi celui des trois femmes et de l’homme qui maintenant partagent son quotidien. Car tous les quatre, aussi, recèlent des mystères, des souffrances, des espérances dont les voiles se lèvent progressivement, partiellement.

Dans le style tout en finesse et en sensibilité qui lui est propre, Jeanne Benameur construit le roman de ces destinées qui accompagnent celle d’Octave. « Entre eux et moi, au fil des jours, quelque chose s’est bien tissé. Un drôle de fil de vie à vie. Ma vie, elle ne vaut pas plus que la leur ». Pas plus, mais pas moins, dirait-on. À mesure qu’avance le temps, les liens se resserrent non seulement entre eux et le vieil homme, mais entre chacun d’entre eux, « de vivant à vivant ». Et au seuil de la mort de son occupant, la grande maison se met à respirer d’un souffle nouveau, humain, tellement humain.

Jean-Pierre Longre

 

www.actes-sud.fr  

Lire la suite

12/06/2014 | Lien permanent

Décès de Pierre Autin-Grenier

PAG.jpgParti vérifier l’inutilité de l’éternité, Pierre Autin-Grenier nous a quittés le 12 avril 2014. Privés de l’amitié chaleureuse de l’homme, il nous reste le souvenir des "jours anciens", la tendresse et la verdeur de sa plume, toute son œuvre à lire et à relire.

http://jplongre.hautetfort.com/tag/pierre+autin-grenier

http://www.lemonde.fr/culture/article/2014/04/12/mort-de-...  

www.libramemoria.com/avis/le-progres/rhone/2014/04/15/avis-pierre-autin-grenier?Page=1

 

 

Lire la suite

13/04/2014 | Lien permanent

Vient de paraître… Yves Wellens

Nouvelle, francophone, Belgique, Yves Wellens, Jean-Pierre Longre, Espace Nord, Les impressions nouvelles Yves Wellens, Le cas de figure, postface de Jean-Pierre Longre, Espace Nord, 2014

Présentation de l’éditeur :

« Dans Le Cas de figure, 99 récits brefs – avec un inédit – se suffisent chacun à soi-même, mais ne peuvent être dissociés d’aucun autre de l’ensemble qu’ils constituent. Présentant ces récits comme des faits divers dont l’écriture et le style attesteraient la réalité possible, par l’entremise d’un narrateur au statut toujours indéterminé, Yves Wellens adopte le registre du rapport lapidaire et de la communication scientifique. Bref, du cas de figure. Il a élaboré une forme qui, par différentes méthodes et techniques de narration, incite le lecteur à déchiffrer des faits : quand le vraisemblable se transforme en fiction, et que celle-ci étend son territoire jusque dans le vraisemblable. »

« Yves Wellens a publié cinq livres, de 1995 à 2011, les premiers de prose, contes, nouvelles et récits, et un roman en dernier. Un spectacle de théâtre (Belga Bordeelo) a été créé en 2010 à Mons et à Gand à partir de D’outre-Belgique (2007). Yves Wellens a donné un grand nombre de contributions à des journaux et revues, dont Marginales, et à des volumes collectifs. »

http://www.espacenord.com

http://www.lesimpressionsnouvelles.com

http://jplongre.hautetfort.com/tag/yves+wellens

Lire la suite

22/04/2014 | Lien permanent

Chiens noirs et carrioles rouges

Poésie, francophone, Pierre Autin-Grenier, Georges Rubel, Éditions Les Carnets du Dessert de Lune, Jean-Pierre LongrePierre Autin-Grenier, Chroniques des faits, illustrations de Georges Rubel, Éditions Les Carnets du Dessert de Lune, 2014

Des faits réels ? Des chroniques historiques ? Le titre pourrait nous le faire croire, que dément l’image de couverture, ainsi que toutes celles – débordantes, colorées, vivaces, mortifères, sanglantes, printanières – qui, dépassant largement la simple illustration, ponctuent les textes.

Et ceux-ci nous mènent loin au-delà de l’horizon et de nous-mêmes, nous encourageant à la patience, à la révolte et à l’espoir de revoir « la grande carriole rouge de l’avenir », nous incitant à bannir le mensonge et à lancer comme un grand cri « un fantastique appel à la vie », à chasser la mort pour ensemble aller « voir la mer », accompagnés d’« un chien rêveur »…

L’écriture de Pierre Autin-Grenier, réalisme et onirisme mêlés, réclame la relecture – et cette réédition est en l’occurrence une belle occasion de se replonger dans des poèmes en prose à propos desquels « on n’est sûr de rien », mais que l’on déploie sans se lasser d’entendre leurs harmoniques ni de se mettre au pas de leurs cadences, tout en écoutant les appels à se ressaisir. Le lecteur, ainsi « délivré du néant » et pensant peut-être à Rimbaud, devient alors apte à marcher, « seul en son vertige, vers d’incroyables Éthiopies ».

Jean-Pierre Longre

www.dessertdelune.be

Lire la suite

Ironiques interrogations

Arnaud Calvi, Bimbo, Le Seuil, 2014

Roman, francophone, Arnaud Calvi, Le Seuil, Jean-Pierre LongreSi l’on veut ne s’en tenir qu'à la trame narrative, on la trouvera peut-être vacillante. Disons : le narrateur, jeune professeur de Lettres, entré un soir dans une boîte de strip-tease (sous les yeux, d’ailleurs, de l’un de ses élèves), se fait aborder par un « Slave » qui lui remet un étrange paquet, et le blesse ; une « bimbo » le soigne, le recueille, prend en charge le mystérieux paquet ; puis la narration tourne autour du travail (un peu) de notre personnage, de son couple problématique, d’un grand ami qui, s’il n’était pas mort, lui donnerait les conseils indispensables, d’un collègue suicidaire, d’une nouvelle rencontre (fantasmée ?) du « Slave », de la recherche presque désespérée de la Bimbo…

Les ingrédients d’un roman à succès sont là, au moins en germe : une dose d’érotisme, un soupçon d’arnaque sur fond éventuel d’espionnage, des esquisses de psycho-sociologie, les déchirures du couple, les souvenirs d’une amitié défunte… Ce serait trop facile. Notre (anti-)héros-narrateur, qui comme Julien Sorel tâche en mainte occasion de se référer (sinon de ressembler) aux grands hommes et aux esprits nobles, avoue perdre trop souvent les fils de l’existence. Impuissance décisionnelle et incertitude mentale semblent gouverner son quotidien, dans un monde fait d’artifices et de paraître – un monde, on l’aura compris, auquel une âme sincère ne peut s’adapter.

D’une tonalité doucement ironique, non exempt de naïveté assumée, ce premier roman pose d’une manière lancinante et maîtrisée des interrogations essentielles (et existentielles), en des circonvolutions syntaxiques où les parenthèses s’imposent comme primordiales. L’ensemble esquisse des récits volontairement avortés et laisse des questions en suspens : quelle est la portée du scandale qu’aurait pu produire auprès des élèves un professeur fréquentant ouvertement les boîtes de strip-tease ? Que va devenir le couple dudit professeur ? Quid de la Bimbo, du « Slave », du narrateur lui-même ? Comment conduire sa vie ? Tout cela sonne faussement romanesque (comme sonne souverainement faux le piano final), mais donne « forme et raison » à la réalité insaisissable du comportement humain. Un beau livre, qui ne laisse pas indifférent et qui donne de quoi attendre la suite…

Jean-Pierre Longre

www.seuil.com

Lire la suite

Des nouvelles d’Estonie, et d’ailleurs

revue, nouvelle, francophone, estonie, Mehis Heinsaar, Antoine Chalvin, Georges-Olivier Châteaureynaud, Gérard Jarlot, brèves, atelier du gué, jean-pierre longre Brèves n° 103, « Estonie » et « Nouvelles inédites », décembre 2013

Que sait-on en France de la littérature estonienne ? Mieux (pire), que sait-on de l’Estonie ? La lecture de la deuxième moitié du numéro 103 de Brèves, sans imposer un savoir encyclopédique, permet d’obtenir une réponse au moins partielle à ces deux questions et, surtout, introduit à la connaissance de ce pays en passant par la porte la plus séduisante, l’ouverture artistique.

D’une part l’art du récit court, avec, par André Chalvin, une « brève histoire de la nouvelle estonienne » et une recension des œuvres traduites en français, puis un entretien de Georges-Olivier Châteaureynaud avec l’un des représentants majeurs du genre, Mehis Heinsaar – illustré par deux nouvelles originales, dont le « réalisme magique » et la poésie onirique stimulent singulièrement la lecture. D’autre part l’art architectural et les arts visuels (peinture et photographie), qui fournissent l’occasion d’un beau cahier en couleurs – ce qui, promis, se renouvellera régulièrement.

Cette deuxième moitié se termine par un « bref » mais intéressant et méthodique « éloge de la nouvelle » par Michel Lamart et deux notes critiques. Et la première ? Elle répond à un autre objectif de la revue : faire connaître des textes et des auteurs nouveaux ou méconnus. Évidemment, ces qualificatifs ne concernent pas Paul Fournel, qui ouvre l’anthologie par trois pages aussi drôles que noires. Ainsi guidée, la petite troupe formée de Sylvie Durbec, Jean-Claude Tardiff, Astrid Bouygues, Monique-Marie Champy, Jean Pézennec, Emmanuel Leriche, Domi Giroud et Christine Sagnier raconte des histoires poétiques, humoristiques, nostalgiques, avant une remise en mémoire, par Éric Dussert, de Gérard Jarlot (1923-1964), qui eut son « heure de gloire », « une existence aussi pétillante que raccourcie », et dont on peut lire une nouvelle dense et fiévreuse.

Après la Norvège, la Suède, le Mexique, l’Espagne, le Liban, la Bulgarie, la Roumanie, la Nouvelle-Zélande et l’Océanie, la revue poursuit son exploration des écritures étrangères, tout en prêtant ses pages à la diversité française. Sûrs de gagner, continuons à miser sur cette « permanence » toujours renouvelée de Brèves

Jean-Pierre Longre

 www.atelierdugue.com

Lire la suite

25/03/2014 | Lien permanent

Question de point de vue

Roman, espagnol, Argentine, Marcelo Damiani, Delphine Valentin, La dernière goutte, Jean-Pierre LongreMarcelo Damiani, Le métier de survivre, traduit de l’espagnol (Argentine) par Delphine Valentin, La dernière goutte, 2013

 Sur la couverture, la mention « roman ». À l’intérieur, sous l’égide d’un certain Alan Moon, joueur suprême et « deus ex machina » (c’est en tout cas ce à quoi il fait penser), six récits qui paraissent bien être des nouvelles autonomes. Il y est question de joueurs d’échecs passablement cérébraux aux relations complexes (« Paradis perdu ») ; de l’étrange voyage qu’un professeur accomplit, sur ordre de sa sœur, en Nouvelle-Zélande (« De l’inconvénient d’être né ») ; d’un écrivain qui, apparemment amnésique, ne se rappelle pas avoir écrit le livre qu’on lui fait signer (« Vivre est un plagiat ») ; d’une traductrice qui, prise entre son mari écrivain et son amant éditeur, finit par faire ses valises (« Par-delà le bien et le mal ») ; d’un critique engagé mais désemparé (« Je critique car je suis critique ») ; d’une jeune femme vivant dans ses souvenirs et sombrant dans la dépression (« Éternel retour »).

Nouvelles autonomes ? Peut-être, mais dépendantes les unes des autres. Au fil de la lecture, on côtoie des êtres précédemment rencontrés, les histoires se dénouent (un peu), se croisent et s’entrecroisent (beaucoup), les situations s’éclairent sans forcément se résoudre. L’île mystérieuse où tout se déroule est un puzzle ou un échiquier dont les pièces sont des personnages qui, croyant maîtriser leur destin, sont les jouets d’illusions et de points de vue subjectifs, tributaires des angles divers sous lesquels la trame commune est présentée.

Tout cela induit une réflexion sur l’écriture, la diffusion et la lecture littéraires (il en est abondamment question), mais aussi une méditation sur la destinée et la condition humaines, sur la vie et la mort (les allusions à des philosophes ou à des moralistes comme Cioran parsèment la narration). Cela dit, dans cette mise en abîme de l’existence humaine et de la perception qu’on en a, les mystères ne sont pas complètement levés, ce qui n’est pas étranger au charme inquiétant du Métier de survivre.

Jean-Pierre Longre

www.ladernieregoutte.fr  

Lire la suite

07/05/2014 | Lien permanent

Page : 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48