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07/01/2014

La diplomatie dans tous ses états

Bande dessinée, film, francophone, Lanzac, Blain, Dargaud, Jean-Pierre LongreLanzac & Blain, Quai d’Orsay, chroniques diplomatiques, édition intégrale, Dargaud, 2013

Le ministère des affaires étrangères, ce n’est pas une mince affaire, surtout lorsqu’on doit travailler sous les ordres d’Alexandre Taillard de Worms, qui ressemble étrangement à un homme politique nommé il y a quelques années au Quai d’Orsay, où il a fait valoir son panache, son verbe grandiloquent et son orgueilleuse résistance au bellicisme américain.

Arthur Vlaminck, jeune expert en « langages », est chargé d’écrire les discours du ministre. Difficile apprentissage de la réalité diplomatique, de la vie énigmatique et grouillante d’un cabinet ministériel : rivalités, intrigues de couloir, mesquineries d’antichambre, petits drames, franches rigolades, jeux de séduction, colères rentrées, stress quotidien, le tout apaisé par la sagesse du chef de cabinet, et dominé par les foucades intellectuelles, les conseils hautains, les envolées lyriques, les entrées et sorties inattendues, les claquements de portes, les ordres et contrordres capricieux d’un Alexandre au sommet de sa forme. Notre Arthur a beau faire, jour et nuit, au détriment de son intimité, rien n’agrée au ministre, même si c’est lui qui a dicté l’essentiel de l’argumentaire quelques minutes auparavant. Une idée à chaque instant, fusant de son esprit ouvert aux quatre vents, devrait être mise en pratique par les membres de l’équipe – s’il n’y avait ce bon Claude Maupas, dont le calme imperturbable, le sens immuable de la synthèse et de la mesure viennent souvent à bout de l’agitation, de la boursouflure et de l’absurdité récurrente à laquelle les omniprésentes citations d’Héraclite ne sont pas étrangères.

Lanzac et Blain s’en sont donné à cœur joie, dans un album consistant, où la caricature voisine avec la finesse, où le réalisme n’exclut pas l’onirisme, où la vivacité se combine avec les jolis temps de pause, où l’Histoire mondiale se nourrit d’histoires personnelles, où la drôlerie est à la mesure des enjeux humains, où chaque épisode est un bijou graphique. Rien d’étonnant à ce que Bertrand Tavernier s’en soit emparé pour en faire un film savoureux, devenu populaire. « Ce qui m’a séduit, c’est le parfait équilibre entre une force comique irrésistible et, de l’autre, une vérité, une grande réalité, dans les personnages, les situations et les dialogues. ». L’essentiel est dit.

Jean-Pierre Longre

www.dargaud.com

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