10/11/2014
Retour sur Panaït Istrati
Monique Jutrin, Panaït Istrati, Un chardon déraciné, Éditions L’Échappée, 2014
Panaït Istrati, Présentation des Haïdoucs, Éditions L’Échappée, 2014
Longtemps méconnu, souvent ignoré, parfois méprisé, Panaït Istrati est pourtant l’un des grands écrivains européens des années 1920. Il revient en force, et c’est justice. L’association des Amis de Panaït Istrati, qui a récemment repris ses activités éditoriales, témoigne en particulier de cette réhabilitation, et y contribue avec bonheur, de même que plusieurs publications récentes.
Monique Jutrin (qui a par ailleurs écrit plusieurs ouvrages sur Benjamin Fondane) a publié en 1970 la première grande biographie de l’auteur des Chardons du Baragan et de maints autres romans, un auteur qui était alors « oublié en Occident ». Ce livre, réédité avec retouches et actualisations de rigueur, se lit aujourd’hui avec autant d’intérêt qu’il y a quarante ans, faisant redécouvrir à la fois le « conteur » et « l’homme passionné », qui a connu « tous les degrés du bonheur et de la misère ». La première partie est un récit de vie intimement lié à l’œuvre, et aussi passionné que le fut l’homme – ce qui, dans le cas d’Istrati, est de très bon aloi, très naturel aussi. Les voyages, le « déracinement », les déboires, les joies, les illusions et désillusions politiques, l’entrée en écriture – tout fait l’objet de recherches précises, de témoignages directs, sans que soient occultées les questions (par exemple à propos de la tentative de suicide de 1921), ni « les détours et les contradictions dont est faite cette vie ».
La seconde partie de Panaït Istrati, Un chardon déraciné est spécifiquement consacrée à l’œuvre : les racines, les « sources populaires et historiques », « l’art du conteur », la réception… Une analyse fouillée, s’appuyant sur des citations nombreuses et convaincantes. Le livre de Monique Jutrin, documenté, vivant, relève à la fois du sérieux universitaire et de la lecture engagée auprès d’un auteur qui proclamait volontiers qu’il n’était « pas un écrivain comme les autres ».
Le lecteur qui voudra (re)prendre contact concrètement avec l’œuvre (re)lira avec bonheur un autre ouvrage réédité par L’échappée, Présentation des Haïdoucs, que Panaït Istrati publia en 1925, après Oncle Anghel et avant Domnitza de Snagov. Entre une préface discrètement personnelle de Sidonie Mézaize et une étude littéraire circonstanciée de Carmen Oszi, les récits de Floarea, d’Élie, de Spilca et des autres comparses disent avec vigueur qui sont ces bandits au grand cœur, ces hommes (et femmes, oui !) d’honneur, ce que sont leurs sentiments et leurs exploits dont l’écho résonne avec puissance et originalité dans la rugueuse musique de l’écriture istratienne.
Jean-Pierre Longre
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10:48 Publié dans Essai, Littérature | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : essai, roman, francophone, roumanie, monique jutrin, sidonie mézaize, carmen oszi, panaït istrati, éditions l’échappée, jean-pierre longre | Facebook | | Imprimer |
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