22/04/2018
Trois frères et leurs secrets
Yves Wellens, Cette vieille histoire, Ker éditions, 2018
Les trois frères Wellens (d’emblée, ce nom, qui est aussi le pseudonyme de l’auteur, pose question sur le statut même du récit que nous avons sous les yeux), les trois frères Wellens, donc, sont bien différents les uns des autres : il y a Pierre, riche promoteur immobilier, sur qui pèse la menace de révélations que pourrait faire un journaliste connu ; il y a Yves, qui en tant qu’écrivain se fait appeler Arcens (décidément, les pseudonymes se succèdent, s’emboîtent), bien éloigné du monde des affaires ; et il y a Gilles, qui n’a plus donné signe de vie depuis un certain temps, mais qui réapparaît par le truchement d’une lettre adressée à Yves.
Cette lettre est relative à la fois à l’enquête menée par le journaliste sur Pierre, à la gifle violente que celui-ci a reçue en public de la part d’une jeune femme, et à la « vieille histoire » qu’ont vécue autrefois les trois frères face à leur père alcoolique. Une « vieille histoire » qui les a à la fois réunis et séparés, car elle a mis à nu leurs personnalités respectives, notamment celle de Pierre, dont l’ « étrange sourire » ne le quittera pas. De son côté, Arcens l’écrivain mène une enquête sur ce frère au « sourire malsain », retrouve grâce à Gilles la jeune femme qui l’a giflé et saisit ses motivations, tandis que Pierre reçoit l’aide de Vinx, sorte d’espion privé et d’homme de main.
Cette vieille histoire relève du thriller parfois violent, du roman urbain (les choses se passent dans différents lieux de Bruxelles, que l’auteur connaît bien), de l’intrigue psychologique et familiale, de la satire sociale. On ne fera pas ici de révélations sur les secrets et les malaises des personnages, que l’auteur d’ailleurs ne fait que suggérer (pouvoir de suggestion que possèdent aussi les illustrations de Noam Van Cutsem). Yves Wellens a l’art de décrire et de raconter sans révéler ouvertement l’essentiel, laissé à la discrétion du lecteur. « Pour qui connaissait leurs rapports en demi-teinte, il n’était pas surprenant que les deux frères ne se voient que de loin en loin. Quelqu’un qui aurait été attablé au balcon ou dans la mezzanine d’un établissement, et se serait penché pour les apercevoir en contrebas, aurait ressenti que l’air à leur table était saturé de méfiance, et qu’un certain embarras flottait et se diffusait lentement autour d’eux. ». On pourrait le constater en citant d’autres passages, le lecteur se sent comme un observateur objectif qui ignore mais tente de deviner ce qui se cache sous les apparences. Les énigmes du roman recèlent des vérités insoupçonnées.
Jean-Pierre Longre
19:37 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : roman, francophone, belgique, yves wellens, noam van cutsem, ker éditions, jean-pierre longre | Facebook | | Imprimer |
14/04/2018
Vient de paraître : un recueil d’Ana Blandiana
Ana Blandiana, Ma Patrie A4 / Patria mea A4, recueil bilingue traduit du roumain par Muriel Jollis-Dimitriu. Introduction de Jean-Pierre Longre. Black Herald Press, 2018
Un poème que je ne dis pas, un mot que je ne trouve pas
Mettent en péril l’univers
Suspendu à mes lèvres.
Une simple césure dans le vers
Détruirait le sortilège qui dissout les lois de la haine,
Les rejetant tous, farouches et solitaires,
Dans la grotte humide des instincts.
« Biographie »
Née Otilia Valeria Coman en 1942 près de Timişoara, Ana Blandiana a été très tôt en butte à la censure, mais a persisté dans sa volonté d’écrire en restant dans son pays, exilée de l’intérieur. Dès le premier recueil, publié en 1964, sa poésie a connu un succès d’autant plus grand qu’elle correspondait à l’état d’esprit et à la sensibilité de lecteurs qui ne pouvaient complètement étouffer leurs interrogations existentielles sous les diktats du régime. Depuis 1990, son œuvre s’est largement étoffée, et elle est considérée comme l’un des auteurs les plus marquants de la Roumanie contemporaine. Autant dire que toute traduction publiée en France contribue à rendre justice à une œuvre qui mérite d’être reconnue internationalement. (Jean-Pierre Longre)
*
Orice poem nespus, orice cuvânt negăsit
Pune în pericol universul
Suspendat de buzele mele.
O simplă cezură a versului
Ar întrerupe vraja care dizolvă legile urii,
Vărsându-i pe toţi, sălbateci şi singuri,
Înapoi în umeda grotă-a instinctelor.
« Biografie »
Pour commander l’ouvrage :
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Pour en savoir plus:
https://blackheraldpress.wordpress.com/books/ma-patrie-a4...
22:39 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, roumanie, ana blandiana, muriel jollis-dimitriu, black herald press, jean-pierre longre | Facebook | | Imprimer |